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Site sur la Science-fiction et le Fantastique

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Le Téméraire (4)

LE TEMERAIRE 4

 

III.      L’ ISLE.

 

Après huit jours d'une navigation sans, histoire, uniquement ponctuée des rites familiers du bord : manger, dormir, prendre le quart on sentit que l'on approchait des lieux familiers aux mauvais garçons de la côte. Bientôt la vigie cria le met fameux mot qui fait tressaillir tous les marins du monde : terre! terre!

 

A l’horizon, pour peu qu'on le scrutât, on distinguait un tout petitt morceau de rocaille. Julien devina qu'il s'agissait de l'Isle du caïman, où se trouvait le port favori du " Téméraire" et d'un certain nombre d'autres vaisseaux pirates qui relâchaient ici entre deux forfaits.

 

Tout le monde  était monté sur le pont et contemplait avec un air réjoui l'Isle se rapprochant comme en un rêve. C' était leur havre de paix; ici ils trouvaient tavernes ripailles et femmes.  Ils parvinrent agités,  dans le joli petit  port, flanqué de deux fortins bordant les eaux bleutées.

 

L'entrée à vitesse réduite, tandis que l'on voyait sur le quai la petite foule des gens qui attendaient le "Téméraire" ne posa aucun problème particulier, puis ce fut l'accostage et les retrouvailles.

 

XXXXXXX

 

Julien qui ne possédait pas de domicile proprement dit avait coutume lors de ces séjours à l'Isle du caïman de prendre pension à la"Taverne des Boucaniers" dont la patronne, la belle Rosita était devenue sa maîtresse. Rosita s'était vraiment toquée de lui, mais elle s'accordait à sa personne un peu fantasque et ses longues absences ne la faisait point souffrir. Elle le prenait lorsqu'il était présent et s'en passait lorsqu'il n'était pas là.

 

Cependant chacun de ses retours était prétexte à une fête bruyante et endiablée dans la taverne. Et le soir venu; ils baffraient et dansaient. Rosita chantait assez joliment, le teint doucement coloré,de nostalgiques chants espagnols qui lui rappelaient son pays d'origine qu'elle avait quitté alors qu' elle n'était encore qu'une enfant.

 

Ensuite ils montaient faire l'amour dans la haute chambre avec le lit à baldaquin profond comme un vaisseau et qui tanguait du plus doux et du plus berceur des tangages.

 

" Quelle navigation! " pensa. Julien. en se réveillant le lendemain, encore à moitié endormi tout en buvant un café brûlant, C' était le meilleur instant, celui qui sépare le sommei1 de la veille comme celui qui sépare la nuit du jour indistinct, pas encore nuit mais pas encore jour.  L’imagination vagabondait librement se remémorant la volupté, le corps rompu d’une agréable fatigue.

 

Rosita, dont le parfum flottait encore dans la chambre, était partie depuis bien longtemps, vaquant en ville aux mille besognes que nécessitait la taverne. Vive et débrouillarde, elle allait et venait dans la cité sans problèmes.

On avait l'impression que deux personnes cohabitaient sous la même peau: une amoureuse enflammée et romantique et une commerçante pratique et avisée.

 

Julien se demanda si au fond, d'ailleurs, elle n' était pas toujours une commerçante avisée et si l'or n'était pas son plus grand amour.

 

« Q'importe se dit-il, si nous avons au moins l'illusion. De toutes façons l'amour n'est qu'illusion, et peut-être n’ais-je que 1'illusion de l'illusion! Mais ma parole, je philosophe comme un jésuite et presque aussi mal. Levons nous, il est temps. »

 

Au même instant une sonnerie grêle retentit, jaillie d'une petite clochette assez innaparente  poste sur un meuble. Julien se précipita dans l'escalier pour monter au pigeonnier niché dans une sorte de tourelle de la taverne.

 

Cette sonnette avertissait qu'un pigeon venait d'arriver porteur d'un message. En effet, dès qu'un de ceux-ci se posait sur un perchoir un ingénieux mécanisme déclenchait la sonnerie.

 

Julien par le biais de ce mode de communication extrêmement rapide était en relation, entre autres, avec la capitale où il possédait un informateur bien introduite auprès des  espagnols- et le payant bien le tenait au courant des navires de commerce pouvant l'intéresser, et ceci suffisamment à l'avance pour pouvoir les intercepter éventuellement, ou l'avisait aussi du mouvement des vaisseaux de guerre dont il devait se défier.

 

Ce système de courrier remarquable était une des causes de la rapidité d'intervention bien connue du commandant du « Téméraire » qui apparaissait là où on ne l'attendait pas, et semblait toujours flairer les cargaisons les plus profitables. Cette sorte de " divination " stupéfiait  ses ennemis qui n'étaient pas loin d'y voir une intervention démoniaque.

 

« Que m'apporte-tu,  bon Vélox " dit Julien en se saisissant du pigeon. Chacun de ses pigeons avait en effet un nom et était presque considéré comme un être humain, une sorte de messager de la flibuste. Sous ses doigts, il sentait la palpitation du frêle corps.

 

Il lui délia délicatement le message ficelé à la patte. L’écriture le surprit. Ce n'était pas celle de son agent, mais une écriture de femme ou de jeune fille.

 

« Monsieur l'Amiral de la Flibuste, »

 

Tudieu ! Sifflota Julien, me voici amiral.

 

Mon père, le Marquis de la Casa Bella, le gouverneur de ces ILES, veut me faire épouser le vieux Comte Lopez del Libero qui est le général de l'armée et que je hais. Pour ce faire il me retient prisonnière dans ma chambre de l'aile gauche du chateau.

 

Libérez-moi monsieur, et je serais toute à vous. Dépêchez-vous, je vous en prie, le mariage a lieu dans huit jours.

 

ISABELLA.

 

N.B Ci –joint un petit plan de l’aile gauche du château

 

Un mot d’une autre main était ajouté, 2crit par l’agent de Julien dans la capitale des Iles.

 

« C' est la duègue  de  Isabella de la Casa Bella qui m'a remis ce mot, m'invitant à vous le transmettre. J'ignore comment         elle se doute que je suis en relation avec vous.

 

En ville il se dit que la fille du Gouverneur est bien retenue dans sa chambre pour épouser le Comte. Mais ce peut être un piège. Prenez garde à vous. Isabella est une très jolie jeune fille d'environ seize ans, brune de cheveux, teint clair,agréablement tournée et fort enjouée à ce qu'il parait.

 

A votre place, je me méfierai

 

Votre Dévoué

Roberto Gonzalez

 

" Quelle histoire" pensa Julien intrigué et amusé tout à la fois. Cela a en effet tout l'air d'un piège. Mais il semble vraiment énorme pour faire tomber l' AMIRAL DE LA FLIBUSTE dedans.

 

D'autant plus qu'il ne connaissait pas Isabella... Il se rappelait tout au plus d'une fillette brune et prétentieusement vêtue qu'il avait croisé un jour au détour d'une rue de Las Santa alors qu'elle se trouvait dans le carrosse du Gouverneur et que lui marchait à pied. La rue était boueuse et les roues du carrosse avaient projeté des éclaboussures sur son vêtement. Il avait ressenti cela comme un affront. C'était le seul souvenir qu'il avait d'Isabella, si l'on peut appeler cela un souvenir...

 

Et peut-on imaginer, qu'on vole au secours d'une jeune fille Qu'on- ne connaît pas, qu'on risque sa vie et ses biens pour l'enlever aux griffes d'un vieux grigou ?

 

Julien continuait de s'interroger. Si on écarte l'idée du piège et elle est  à écarter, qu'est-ce qui pourrait pousser Isabella à faire appel à moi ? Un romantisme juvénile qui dans son imagination a fait  de moi un justicier redresseur de torts? Et à qui pourrai t-t-elle s'adresser à part à moi; Ce n'est pas dans son univers qu'elle pourrait trouver quelque secours. Qui oserait s'attaquer au tout puissant Gouverneur des Isles? - Personne.

 

 

Et l'idée que l'on pût faire appel à lui Julien contre la toute puissance du représentant de l' Espagne le séduisait assez.

Etait-ce par le péché d'orgueil que l'on comptait le faire tomber, lui oui avait déjoué tous les  traquenards jetés sur son passage jusqu'à ce jour ?

 

Cependant Julien sût tout de suite qu'il tenterait d'aller délivrer la prisonnière, et qu'il ne pouvait y échapper. Cela était inscrit dans le Grand livre de sa destinée.

 

Et il se la représentait, jeune et belle, se morfondant dans sa chambre verrouillée et grillagée tandis que les larmes coulaient de ses grands Yeux brillants et noirs.

 

Julien pensa qu'il serait doux de la sauver, et, d'avoir avec sa reconnaissance, son amour enthousiaste et réservé tout à la fois.

 

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Le Téméraire (3)

Le Téméraire (3)

 

Comme le soir commençait à tomber, « Gueule d'or » le second, proposa d'organiser une petite fête pour célébrer une nouvelle victoire de la flibuste sur le Très catholique Roi d’Espagne. Ceci était d'autant plus facile qu,e les cales s' étaient trouvées remplies providentiellement des meilleures victuailles et des vins 1es plus délicats.

 

Julien accepta, mais il fit transférer dans les réserves du "Téméraire" une grande partie des vivres voulant éviter un trop grand gaspillage, sachant ce que étaient capables de foire les hommes une fois ivres.

 

L'ambiance était d'une très grande gaîté. Déjà certains se mirent à. chanter, tandis que d'autres sortirent de vieux instruments pour les accompagner. Ces chansons qui parlent de flibuste, de voiles et d'amour et de mort. Tout ce qui remplit la vie des hommes qui, naviguent et rêvent aux femmes lorsqu'ils sont à bord et aux contrées lointaines lorsqu'ils sont à terre....

 

On organisa même un bal dans les plus belles cabines du bord, les pirates ayant revêtu des habits de gentilshommes et tachant d'imiter les habitudes maniérées de ceux-ci. Les demoiselles et les femmes prisonnières, blanches de frayeur, sous l'éclat des chandelles leur servaient de cavalières, affreusement gênées de devoir danser avec ces rustauds qui ne connaisaient rien à leurs moeurs et qui leur écrasaient les pieds ou les bouscuIaient en tentant de virevolter avec la grâce de jeunes éléphanteaux.

 

Appuyé à un coffre, l' » élégant » somptueusement vêtu d'un costume qu'il avait du qu’il avait dérober au fond de quelque armoire mais dont on ne saurait1ui en faire grief, tant il le portait à ravir, faisait la cour à sa belle inconnue. Et l'on voyait bien qu'il n'était pas sans lui inspirer quelque attrait, quoique les traits de la belle respiraient l'effroi.

 

Julien croisa le Bosco qui avait, du mal à tenir le cap.

" Alors à-t-on trouvé l'âme soeur, Bosco" interrogea Julien ?

« - A plus de 250 ans on ne peut plus faire des prouesses d'amour, les cartouches ont de la peine à s’enflammer".

 

Répartie qui eût pour effet de faire rire Julien. « N’empêche esprit de l'homme à amour pense toujours » songea le capitaine. C'est lié à l'humaine condition. Et le pirate lui-même au plus fort du combat rêve à lit doux et à présence féminine, et les plus courageux d'entre eux ne sont souvent que de bien faibles enfants face à l'amour. Peut-être au fon que l’amour et la mort sont comme deux soeurs folles unies qui se tiennent la main et se baisent la bouche, deux faces de la même chose.

 

" Vieux fusil peut péter aussi bien que fusil neuf, Bosco" répondit cependant Julien citant un vieux proverbe de la piraterie. Celle-ci était riche de sentences issues de ces hommes rudes, mais non dépourvus d'une certaine sagesse née au contact de différentes aventures aux quatre coins du globe.

 

XXXXXXXXXX

 

Le lendemain matin, par un temps radieux et pimpant comme un baiser de jeune fille de quinze ans, il fut décidé de laisser ici le galion après l'avoir garni de mines pour qu'i1 sauta quelques heures plus tard, et d'abandonner les passagers sur des chaloupes en leur remettant quelques unes de leurs vivres.                                                                                       +

 

L’élégant tenta de prêcher une attitude plus humanitaire.

Julien répondit d'un ton qui n'admettait pas la réplique: « si nous les laissons regagner la côte avec leur vaisseau, ils nous dénoncerons aux autorités et on tentera de nous donner la chasse. Nous ne sommes pas en mesurer de résister seuls à la flotte espagnole qui croise en ces eaux. Croyez-vous un seul instant que si EUX nous attrapent  nous feraient des cadeaux, Monsieur le bel officier ? Et la cravate de chanvre qui serait la dernière de votre vie pêche aussi bien par son inconfort que car son inélégance, ce qui ne doit pas manquer d'impressionner un homme de goût tel que vous. De surcroît il ne me messied pas que le "Téméraire" reste une légendé, présent partout et visible nulle part et dont rien que l'évocation du nom série la terreur dans les mers. Une idée plus q'un vaisseau. D'ailleurs c'est plus l'Amour qui vous fait parler que l'humanité. Car si nous nous plaçons du point de vue humanitaire nous priverons l'Espagne de quelques dizaines de fieffés coquins. C’est un service que nous rendons à la population. Ce ne  sont que voleurs, fourbes et canailles. Qui ne verserait pas une seule larme sur leur disparition si ce n’est leurs créanciers sans titres de créances.

 

«  Quel est son nom?" ajouta en changeant de ton Julien.

« - Elle se nomme  Eléonore, et son âme est pure et noble, comme il n'est pas possible de l’être. Pourrais-je l’emmener avec moi?

 

Elle m'a promis de vivre notre vie et de ne jamais se plaindre.

"- Si nous faisions ceci, ami, nous serions assaillis par toutes les femmes du bord oui voudraient épouser des marins et jureraient qu’elles en sont tombée: subitement follement amoureuses. Et si chaque pirate estimait aussi avoir le droit d'emmener une femme? Non, cet exemple serait pernicieux. D'ailleurs plus tard tu me remercieras de t'avoir tiré de ces griffes ensorcelées.

 

Les passagers furent Chargés dans des canots, tandis que de la dunette Julien surveillait l'opération. Il y eût quelques scènes déchirantes, les femmes se jetant aux pieds des marins en les priant de les épargner.

 

Le prieur du bord lança quelques invectives à l'adresse des pirates, les menaçant des foudres du ciel une fois qu'ils seraient parvenus dans l'autre monde.

 

" Recommande plutôt ton âme à Satan ton suzerain" rétorqua Julien. Tu en auras grand besoin. Il t'attend en grande pompe." Comme le curé continuait à marmonner et qu'il cracha en direction du drapeau noir à tête de mort, emblème fameux des pirates, Julien sortit froidement son pistolet et abattit le prêtre. Ce fut comme un frémissement qui parcourut l’équipage et les passagers espagnols. Tuer un prêtre était un grand sacrilège et le bandit le plus­ mécréant hésitait toujours à le faire.

 

 

Puis les canots s'éloignèrent peu à peu dévorés par l’Océan.

 

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Published by Stéphane Dubois - pirates, zombies, Héroic Fantasy, Horreur, LITTERATURE, Auteur, Fantastique, Fantasy

Le Téméraire


 

 

I ) AU BATEAU.

 

I1 se souvenait _maintenant...

 

Il avait ouvert la fenêtre. L’air était chargé de lourds parfums  qui venaient, de la Mer. Tandis qu'une lumière intérieure semblait lui éclairer le visage, ses narines dilatées se mirent à palpiter, comme si une vie supérieure s’était emparée de lu i .

 

Ouvrant une armoire, il se saisit d'une chemise de soie blanche, d'un pantalon  noir et mû par, une inspiration soudaine s’entoura la taille d'un foulard rouge qu 'il avait coutume de se passer  autour du cou.

 

Se jetant un regard au travers du miroir, il se trouve métamorphosé.

 

 

De la  manière  la  plus habituelle il sortit par une fenêtre qui donnait sur les toits. Son acuité visuelle semblait décuplée ainsi que son agilité et quoique seules quelque pales clarté de la lune éclairaient l es toits, il s'y apercevait avec facilité.  Des puissances obscures semblaient le pousser vers la mer qu’il apercevait  au 1oin au travers de l' entrelacs des cheminées.

 

Arrivant à un à  pic du toit, alors qu'il lui fallait quitter  les sommets pour poursuivre sa route, il commença par une descente vertigineuse et termina par un bond assez prodigieux, lui, oui en d'autres temps souffrait du vertige et pouvait tout juste gripper sur un escabeau. Une fois au sol il buta sur un ivrogne goguenard qui écarquilla les yeux, abasourdi par ce qu'il voyait, ne sachant trop s'il s'agissait d'une vision alcoolique.

 

Il se décida, sans trop savoir pourquoi, à éviter le port craignant qu'il fut peu sûr pour lui alors qu'il en empruntât  les ruelles journellement pour se rendre à son bureau, et qu’il aimait ordinairement à y flâner respirant les odeurs venues de gargotes, écoutant la voix des filles et lorgnant la lourdeur de leurs corsage.

 

Il prit, se glissant avec souplesse dans la semi-pénombre craignant qu'on ne l'épie, le petit chemin qu'on appelait " passage des douaniers", et qui se nommait ainsi parce qu'il avait servir dans les temps éloignés aux rondes des douaniers surveillant l'éventuel accostage de vaisseaux contrebandiers.

 

Arrivé à une petite crique qu'il connaissait bien, il ne fut pas autrement surpris de s'apercevoir qu'une barque silencieuse, à demi-camouflée par les herbages l'attendait.

 

Un homme à bord, la figure à demi-dévorée par un bandeau noir tirait silencieusement sur sa vie1le vieille pipe.

 

"Le Borgne" pensa Julien.

« - C'est le Borgne en effet Commandant" dit celui-ci comme s'il avait entendu ce qu'il se disait dans le subconscient de son chef.

 

"Et rudement content de vous voir. On vous croyait disparu depuis ce temps."

 

Julien sauta légèrement dans l'embarcation qui oscilla sous son pied. Cette instabilité lui fit du bien, comme s'il retrouvait ici son vrai élément.

 

"Votre sabre" dit le Borgne, "et votre pistolet"

Il se tata immédiatement. Il les avait oubliés!

"Sans eux vous êtes comme un curé sans sa soutane"

Et le Borgne tira 1e sabre et le pistolet de dessous une cape qui était posée là. L'éclair du métal brilla soudain en même temps que le mince sourire du Borgne. "Intact et en bon état " dit-il.

-- "Dame, Commandant, c'est du métal. Un coup de chiffon et ça brille"

-- "C'est vrai. Et ça ne plie pas sur les crânes.

Je te retrouve avec plaisir ma vieille épée et mon vieux pistolet".

Il eut presque envie de les embrasser, tandis qu'une joie sauva de l’étreignait.

 

Alors que le Borgne souquait sur l’eau noire où dansaient des paillettes scintillantes, Julien se demandait quel pouvait être son age. Certes sa vigueur physique était intacte, son oeil restant brillait d'une vie ardente, et un sourire ébréché se jouait souvent sur son visage... Mais le gris de ses cheveux semblait avoir été poudré depuis bien longtemps par les mains du temps, et son teint tanné par le sel des mers semblait l'être depuis des siècles...

 

Là-bas, au loin, les feux de la ville oscillaient et s'éloignaient comme un décor de théâtre qu'on retire dans la semi-pénombre.

 

I1 entrait par les portes grandes ouvertes sur un monde où l'intensité de, la vie était mille fois plus grande et où la peau vous moulait le corps comme un costume enfin à votre taille.

 

Soudain, au détour de la nuit, apparût la grande masse silencieuse et noire d'un bateau complètement éteint, dansant doucement au milieu de la pénombre tel un rêve au creux d'un crâne.

 

" Le Téméraire" s'exclama Julien avec un étonnement émerveillé à la fois parce qu'il le reconnaissait et qu'il pouvait lire son nom en lettre d’or à demi effacé, tandis qu'ils approchaient à le toucher, sur la coque.

 

Une échelle de corde pendait au bastingage.

 

" Après vous, Commandant ». Et Julien escalada l'échelle avec une souplesse et une vigueur qui lui ravit l'âme.

 

C'est avec recueillement que Julien posa le pied sur le pont. En jetant un oeil autour de lui, en touchant les cordes et les bois, en respirant la narine dilatée, il éprouva le plaisir qu'on éprouve lorsqu'on retrouve les parfums et les formes d'un corps aimé perdu depuis longtemps.

Le Bosco qui était déjà sur ses traces alluma quelques lampes.

Tout était enfoui sous une épaisse poussière qui semblait s'être accumulée depuis des siècles. Ça et là des hommes d'équipage gris et livides sous les lampes, eux aussi recouverts de poussière paraissaient ainsi depuis des temps immémoriaux. Ils venait d'on ne sait où et quelque désastre inconnu semblait le avoir surpris ici tel qu'ils se trouvait alors. Et c'était comique et grave tout à la fois.

 

Le Bosco examina les hommes d’équipage les uns après les autres d'un air dubitatif en leur collant sa lampe sous le visage. Pas un signe de vie n'apparaissait : ils ne respiraient point et, leurs regards étaient fixes.

 

" Ça ne va pas être facile, Commandant. Ca ne va pas "être facile avec ces gaillards. J'ai peur qu'ils ne soient rouillés.. Depuis c e temps. "

 

Le Bosco esquissa un geste et une mimique empreinte de pessimiste.

 

Ils descendirent avec respect à l'intérieur du bateau, le Bosco précédant avec son fanal le Commandant, comme s'ils visitaient les entrailles de quelque mammouth géant conservé intact par les glaces depuis des siècles.

 

Avec un bruit sec, le Bosco poussa la porte qui accédait au carré des officiers. Quatre officiers semblaient avoir été figés comme des statues tandis qu'ils étaient en train de deviser avec animation. L'un faisait le geste de bourrer sa pipe, le bras de l'autre était bloqué tandis qu'il se versait du vin. La bouteille était à demi inclinée, mais dans le fond du verre  poussiéreux i1 ne restait qu’une trace noirâtre -.Un jeune blondinet à l'uniforme soigné tripotait ses boutons d'uniforme du bout des doigts, tandis que son regard bleu semblait fixer le lointain.

 

" L' élégant, C'est l' élégant" dit Julien avec un sourire amusé ;Julien avec sourire amusé. Toujours soigneusement vêtu, sa devise était de l'or et des femmes." Et ajoutait-il "si nous avons de l'or et pas de femmes nous finirons bien par en trouver."

 

Donc « de l'or » était suffisant.

 

Julien avec la crosse de son pistolet frappa un gong qui se trouvait sur un bahut. A cet instant on pu voir que quelque chose se passait dans les corps, et lentement comme dans un songe la vie fit sa réapparition. Et dans les regards on eût l'impression que défilaient des séries de souvenirs, que la mémoire revenait du passé, comme un nageur remonte de l'eau.

 

Dans le silence sépulcral, on entend le bruit des souffles qui renaissaient, on vit le poitrines regonfler  expirer.

 

Les officiers écarquillèrent les yeux comme au sortir d'un long rêve.

 

" Messieurs" dit Julien comme s'il poursuivait un dialogue amorcé depuis longtemps, nous faisons route vers les Antilles espagnoles et nous tenterons d'alléger au passage sa Majesté le roi d'Espagne d'un galion chargé d'or. Nos bourses sont si vides qu'elles en pleurent de tristesse. Le Dieu des coquins puisse-t-il nous être favorable

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