Le Téméraire (Fin )
Soudain, au milieu de la nuit, Julien fut réveillé par un énorme craquement de la coque du navire et par des cris de terreur poussés sur le pont par des matelots.
Aussitôt, vaguement inquiet, il tendit les les mains vers le corps d' Isabella, qu'il ne sentait plus contre le sien .pour se rassurer par sa présence. Ces mains la retrouvèrent. Mais il eut l’impression au toucher que le corps d' Isabella n’était plus exactement le même dans ces formes et que ça peau était moins souple et plus rêche. Il lui parut aussi que le parfum suave de ses cheveux et de sa peau n’était plus le même non plus. Julien était fort effrayé et il alluma une chandelle pour se libérer de son doute.
Ce qu'il découvrit sous la lumière dansante de la chandelle le stupéfia. Isabella devant lui était certes bien Isabella et elle lui souriait amoureusement, mais elle était âgée de quarante ans !
Julien pleurait presque et il la lâcha rudement. Puis tout se passa très vite. Il vit horrifié Isabella vieillir à vue d'oeil.
Les années d'une existence normale ne duraient que des minutes. La peau se desséchait, se couvrait de rides,l' éclat des yeux s' éteignait. Ce n’était bientôt plus qu'une petite vieille rabougri et ratatinée dont a nudité, était horrible à voir, qui sentait mauvais et dont, la peau était craquelée comme une terre desséché. Julien la repoussait, elle tendant vers lui ses bras grêles comme les ailes d’un poulet décharné, et lui murmurât dans un rictus horribles : « Viens mon amour ». Julien, terrorisé, tenta de s'échapper alors quelle le regardait avec un air d’incrédulité douloureuse.
Puis l'effrayant processus continua. Il ne fut pas donné à Julien de voir son calvaire se terminer sur la vision de son magnifique amour transformé en vieille femme laide. Les dents tombèrent des gencives déchaussées, le visage devint une horrible gueule contrefaite, effrayante à voir. Puis les yeux jaillirent hors des orbites et roulèrent sur le lit. Le corps tourna à la charogne dans une puanteur incroyable. Le ventre s’ouvrit, laissant voir son intérieur putréfié et les liquides des viscères coulèrent. sur le drap.
" 0 horrible visu " eut pu s'exclamer Virgile en tournant les narines.
Julien réussit à échapper à, ce spectacle d'épouvante, les larmes aux yeux. Il se précipita sur le pont avec les plus grandes difficultés. Car 1ui, marin habitué aux plus rares tempêtes, n’avait jamais vu un bateau agité pareillement. Le " Téméraire " n' était plus qu'un bouchon livré aux éléments déchaînés et sa coque craquait à se briser en émettant des plaintes déchirantes comme celles d’un être humain.
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La prodigieuse accélération du temps avait continué pendant son déplacement dans la cabine du pont. en effet les pirates n'étaient plus que des squelettes tassés dans quelque coin. Cependant le timonier, transformer lui aussi en squelette, dans l'ouragan déchaîné, tenait toujours le gouvernail avec les os de ses doigts. Singulier vaisseau que ce " Téméraire sur lequel s'abattaient de montagnes 1iquides , comme d'énormes gifles sur un vissage, avec un mort à la barre.
Sur un tas de cordages, Julien reconnut l' " Elégant » à sa chaîne d’or autour du cou, qu'il n’abandonnait jamais. Voici où en était ce Don Juan auquel peu de femme avait résisté, si beau à voir, si plein de vie. Un tas d’os sur un paquet de cordes.
« Pourquoi ais-je été les réveiller du sommeil de la mort où ils reposaient si bien ? » se demanda Julien. « Qu’ais-je été l’acteur et le témoin de ces choses horribles ? Pourquoi lorsque le Bosco, sinistre oiseau du destin est venu accoster au rivage, et ma invité à monter dans la barque, ne l’ais-je pas tué avec mon épée ? ».
Puis le « Téméraire » touché par une vague plus formidable que les autres explosa littéralement. Julien senti qu’il partait en l’air et s’évanouit.
XXX
Lorsque Julien reprit conscience, il ne sut pas depuis combien de temps il s’était évanoui. Il avait mal par tout le corps et il avait terriblement froid d'avoir séjourné dans l’eau glacée. Il se trouvait miraculeusement accroché à une grosse planche, sans doute quelque débris du bateau, qui oscillait sur l'eau enfin calmée.
Les premiers contreforts de la côte lui apparurent. A quelque distance des lumières annonçaient la présence d'une ville. S'aidant de ses jambes, malgré l’immense fatigue qui l’emplissait, il tenta de se rapprocher du bord.
Et après un asse z long moment d'effort difficile par le froid qui le glaçait et avec l' aide du courant, i1 fut rejeté sur le rivage d'une petits crique. C'est tremb1ant et surpris qu'il reconnu la petite crique où l'avait attendu le « Borgne » et d'où il était parti pour son étrange aventure.
Ensuite il refit le chemin inverse par le " passage des douaniers, rebuta sur le même ivrogne qui de nouveau écarquillait les yeux, stupéfait et incrédule, de contempler cet homme, qu’il avait déjà vu, trempé et harassé, escalader le chéneau pour monter sur le toit d'une maison. Au cours de son ascension le regard de Julien croisa celui d'une jeune femme qui se croyant seule était en train de se consacrer à sa toilette . Elle ouvrit une bouche toute ronde de surprise.
Puis Julien, tandis qu'un jour sale commençait à poindre à 1’'horizon regagna sa chambre par les toits. Il ôta rapidement ses vêtements trempés, s’essuya avec un linge et se jeta sur son lit. Aussitôt, il s’endormit d’un sommeil de plom.
IV_LE REVEIL
Lorsque Julien se réveilla, consultant sa montre bracelet, il se rendit qu'il était près de dix heures du matin. Il se sentait affreusement mal. « J'ai encore trop bu chez Rosita, hier soir » pensa-t-il et « il n' est pas étonnant que j' aie la gueule bois » ". Rosita était une chanteuse espagnole qui tenait « La Taverne des Boucaniers », où il avait coutume de se rendre le soir. « Sans compter qu'il est inutile insister, elle préfère fréquenter les riches bourgeois de la ville ».
Il se demanda ce qu'il devrait dire au directeur de l'agence de la banque où il travaillait . « que j'ai été malade » pensa-t-il « ce qui n' est même pas un mensaonge ».
Il travaillait en effet dans une banque dont l’emblème publicitaire qu’on pouvait voir sur tous les murs de la ville, était un homme à tête de requin: qui disait « votre argent m'intéresse ». Il lui semblait être l’image de cette société stupide et dévoreuse d’êtres humains.
« J’ai eu un affreux cauchemar cette nuit. J’ai rêvé de bateaux et de filles. Il n’est pas douteux que l’alcool soit nocif et donne des hallucinations. »
Il étaient bien trop tard pour qu’il alla à l’agence ce matin.. Il voyait déjà le directeur plaisantant sinistrement : « vous êtes en avance pour cet après-midi », sous le sourire ironique de ses collègues.
Il pressa sur le bouton de son transistor. C’était l’heure du bulletin d’informations de France N°1. Après un _indicatif musical bien connu, la voix du speaker :
" De las Santas. Nous apprenons d'après une dépêche de L’AFP que la fille du chef de l’état M de la Casa Bella a été enlevée la nuit dernière, par un inconnu accompagné d’une cinquantaine de compagnons armées. 0n pense qu'il d'une action terroriste de révolutionnaires pour obtenir une rançon contre la libération de la jeune fille. Celle-ci Isabella est âgée de 16 ans. Le chef des rebelles vêtu d'un pantalon noir et d'une chemise blanche portait écharpe rouge enroulée autour de la ceinture. Les forces de police de l' Etat des Iles xxx et l'armée ont été mobilisées -pour retrouver la jeune fille.
Machinalement l'oeil de Julien se dirigea vers le fauteuil qui se trouvait dans sa chambre.. « Il faudra que j'aille les jeter dans la mer » pensa-t-il en voyant le sabre et le pistolet qui reposaient ostensiblement sur le siège.
Un pigeon entra tranquillement et vint se poser à coter de Julien. « C’est toi mon bon Vélox » dit Julien attendri en passant légèrement son doigt sur la plume de l’oiseau ravi.
« Toi au moins, tu ne diras rien »
SARDONICA ou la FEMME-PANTHERE (1) - Le blog de Michel Dubat
SARDONICA ou la FEMME-PANTHERE avertissement au lecteur . Le lecteur comprendra sans peine que je n'aie pas voulu citer le nom du couvent dont on parle dans ce texte et que j'aie évité que l'on ...
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