Entretien
Dominique Deconinck
Editeur
Bonjour Dominique Deconinck,
Nos internautes vous connaissent déjà, pour un entretien sur un de vos précédents livres (voir le lien plus bas) cette fois vous allez nous parler de votre maison d’édition :
DDK Anticipation, depuis quand et pourquoi être passé d’auteur à Éditeur ?
Je ne sais pas si la destinée a guidé mes choix dans bien des domaines techniques innovants (météorologie, biométrie, imagerie, etc.) ou si je les ai choisis. La science, qu’elle soit fondamentale ou appliquée me passionne, j’attends toujours avec impatience les revues scientifiques auxquelles je suis abonné. Au fil des années, des discussions, je me suis aperçu que rares étaient les personnes au fait de l’actualité de la recherche. Des exemples :
- Certains ignorent que des véhicules autonomes sont testés dans Paris, que l’IA Watson analyse plus exhaustivement les radios que les radiologues, détectent des cancers mieux que la plupart des oncologues,
- La nature des blockchains dont la technologie est utilisée pour le Bitcoin,
- Que des milliers de vieux Japonais choisissent des robots humanoïdes comme gardes malades. Les cas pourraient être déclinés dans tous les domaines.
- J’allais oublier que des robots autonomes tirent sur certaines frontières sans ordre préalable
- Ou encore les étranges propriétés de la matière quantique (deux photons peuvent avoir des paramètres identiques à des années-lumière de distance, si vous touchez à l’un l’état de l’autre est instantanément modifié).
Entre ces avancées technologiques extraordinaires et les connaissances du grand public, le gap est immense. Comment le combler ? Les journalistes généralistes ne sont que peu intéressés et écrivent des articles relevant du fantasme (l’ordinateur tout puissant) ou infantilisants (le fameux comment, ça marche de certain m’a toujours exaspéré). Les revues scientifiques sont souvent ardues.
Enfant j’ai lu Jules Vernes, et plus âgés Michel Houellebecq, les deux meilleurs écrivains d’anticipation français. Je ne connaissais aucune maison spécialisée dans ce genre, il ne restait qu’à embarquer quelques amis pour fonder une SARL DDk Éditions qui donne leur chance à des écrivains que le thème intéresse.
Dans ce cadre, chaque année nous organisons un concours d’anticipation sur une thématique précise.
Quel est, s’il existe le portrait-robot de vos auteurs ?
Je commence par un point négatif, nous refusons les textes d’anticipation politique. C’est un choix délibéré sur lequel nous ne bougerons pas.
Mais oui, nous avons en tête des profils types d’auteurs, je passerai rapidement sur les fondamentaux, un auteur doit savoir :
- Lire et écrire,
- Comprendre ce qu’est l’anticipation (un futur possible dans un créneau compris entre maintenant et un siècle grosso modo),
- Et sans nécessairement être un spécialiste scientifique, avoir une vision du futur extrapolée des résultats de la recherche ou des possibilités qu’elle engendre.
En résumé je cherche des romanciers ou nouvellistes technophiles.
Justement en parlant de robots, vous organisez un concours de nouvelles sur le thème : robots domestiques, comment ce choix vous a paru s’imposer ?
Le concours Robots domestiques est le quatrième que nous organisons. Je ferai une rapide auto-critique sur le thème retenu en 2015 : les progrès scientifiques de ce siècle. Les auteurs avaient un choix immense entre les possibilités ce qui a donné un recueil un peu fouillis. Le thème de 2016 Transhumanité(s) est arrivé trop tôt : la plupart des auteurs n’avaient qu’une compréhension approximative du sujet, nous avons cependant reçu des textes magnifiques. Avec Véhicules autonomes (2017) le courant a été pleinement établi avec les auteurs, les textes n’étaient plus disparates, mais visitaient le thème avec des éclairages pertinents, soit d’un point de vue policier, poétique ou celui des sociétés d’assurances qui seront bientôt confrontées au problème des accidents entre véhicules autonomes. Le thème Robots domestiques continue dans cette veine : les robots domestiques existent déjà, ils sont utilisés dans les hôpitaux ou dans les centrales nucléaires, ou tout simplement de façon ludique. Je fais confiance à l’imagination des auteurs pour offrir de bons textes.
En quoi le fait d’organiser des concours de nouvelles vous parait-il important ?
Deux axes dirigent cette production :
- Faire connaître DDk Anticipation,
- Faire réfléchir sur les problématiques des prochaines années, des impacts des recherches sur notre quotidien.
Vous avez déjà découvert des auteurs via ce type de concours, et que sont devenus des auteurs maison de livres d’anticipations ?
Oui !
Je vais parler de mon auteur préféré, Yves Cohen-Loro qui a trois fois été primé dont le portrait correspond parfaitement à celui que je décris dans un paragraphe précédent, je le pousse à écrire un roman.
Je pense également à Jean-Baptiste Bing, un géographe reconnut qui, à l’occasion du concours Transhumanité, avait écrit une nouvelle intéressante, il avait réussi en quelques pages à décrire un univers futuriste crédible, à donner de l’épaisseur à ses personnages. Bref, j’étais séduit, je lui ai demandé s’il pensait pouvoir écrire un roman en reprenant l’environnement qu’il avait utilisé et … ça a donné Humains, tellement humains. Je suis très fier de l’avoir déniché.
Je travaille aussi avec une auteure policière qui a connu DDk Anticipation au travers du concours, mais qui n’a pas écrit de nouvelles.
Enfin, je dirais que j’écris lentement un nouveau roman qui portera sur la genèse de Singularité, mon second roman.
Un auteur, Mickael Auffray, a pris son envol dans une autre maison d’édition.
Mais j’espère signer dans les prochains jours avec l’auteur d’un roman insérant ses personnages dans un futur où la fonction RH sera automatisée… Je reviendrai vers vous lors de sa parution.